Les dits de la Huppe

echos des sept vallées

Être agnostique

Être agnostique c’est refuser de croire ce que la raison, la logique n’expliquent pas, ou ne démontrent pas formellement.
L’agnostique ne croit pas, il comprend, démontre mais il ne croit pas.
Pour l’agnostique, paradoxalement, l’athée est un « croyant », l’athée croit qu’il n’y a pas de dieu.
L’agnostique considère qu’affirmer qu’il n’y a pas de dieu est un acte aussi irrationnel qu’affirmer qu’il y en a un (ou plusieurs). Il y a donc autant de différence, pour un agnostique, entre lui et un athée qu’entre lui et un croyant. Le croyant et l’athée sont tous les deux liés par la croyance en une affirmation et en son contraire.
L’agnostique se contente de dire simplement: l’évolution a doté l’espèce humaine d’un état particulier appelé conscience, « je sais que j’existe », et cet état de conscience conduit l’être humain, en général, à se poser les questions bien connues: d’où est-ce que je viens? Qui je suis? Vers où je vais?

L’agnostique s’en tient donc, à un instant t, à ce que la raison, la logique, la science lui permettent de savoir, de comprendre.
Pour le reste l’agnostique se contente de répondre « dans l’état actuel de nos connaissances » je ne sais pas, je ne sais rien, je ne connais même pas le chemin ».
C’est une attitude d’une très grande humilité qui s’oppose à l’orgueil du croyant qui, lui, sait: sa foi, une parmi d’autres, lui donnant toutes les réponses.
Alors qu’ être agnostique, c’est douter, sans cesse.

L’agnostique par ailleurs reconnaît évidemment à chacun le droit intangible de croire ce que bon lui semble, mais l’agnostique dénie à qui que ce soit le droit de lui imposer quoi que ce soit au nom de quelque religion que ce soit.
A une époque où on feint de ne plus savoir très bien ce qu’est la laïcité l’agnostique rappelle utilement que toutes les religions, sans exception, ont toutes un projet de société qu’elles entendent faire aboutir en s’appuyant sur les croyances de leurs fidèles.
La laïcité, elle, établit clairement que les croyances sont exclusivement du domaine de la personne, du domaine privé et donc que tout élu du peuple, quelles que soient ses propres convictions, ne peut dans l’exercice de son mandat y faire référence ou pire s’en inspirer pour décider.
L’agnostique s’en tient à des considérations très claires: je ne sais rien mais je constate que vivre est difficile et que le doute est douloureux; si croire à quelque chose ou quelqu’un vous aide, croyez, mais ne venez pas, au nom de votre croyance, même si une église, quelle qu’elle soit, vous a persuadés que vous êtes plusieurs, que vous êtes même très nombreux à partager la même, ne venez pas, ne tentez pas de m’imposer quoi que ce soit au nom de vos croyances, de vos tabous, de vos pré-jugements.
L’agnostique n’a nul besoin de la promesse d’un quelconque paradis ou de la crainte d’un non moins quelconque enfer pour construire une morale.
La morale de l’agnostique se construit sur un constat de départ: la question n’est pas de savoir qui nous a mis sur ce misérable rafiot de l’espace, ni dans quel dessein, le problème que nous avons à résoudre c’est que faire pour que cet pour que cet espace de temps, que nous appelons la vie d’un être humain, que faire pour que ce temps se passe au mieux, intellectuellement et physiquement, pour le plus grand nombre possible, dans une totale liberté de croyance.
Etre agnostique n’est pas être matérialiste, loin s’en faut, parce que c’est aussi aimer les autres, mais sans condition, sans préalable, et c’est par dessus tout aimer la liberté, celle de chacun.

L’honneur des agnostiques, leur fierté c’est de n’avoir jamais fait de mal à quiconque au nom de leurs convictions puisque que leur seule conviction est qu’il est vain d’en avoir. Aucune église, aucune religion ne peut en dire autant.
Nous ne sommes pas très nombreux mais nous existons depuis toujours.
Dès que le premier sorcier, le premier chaman a compris, dans l’obscurité d’une grotte froide et humide, qu’il pouvait utiliser, manipuler les craintes, les angoisses des autres membres de sa horde, aussitôt un autre homme a compris que le chaman n’en savait pas plus que lui mais en regardant les yeux soudain remplis d’espoir de tous ceux qui écoutaient le chaman, ce premier agnostique a compris aussi que ça ne serait pas facile… et que, innombrables seraient les assujettis!

De Démocrite à Darwin, l’agnosticisme, philosophie, manière d’être, manière de vivre, continue inlassablement à plaider pour la raison et la conscience.

24 janvier 2021 Posted by | Anthropologie, Spiritualités, Valeurs | Laisser un commentaire